Quelques fondamentaux sur l’antifascisme

Le Réseau Angevin Antifasciste vient de sortir un très bon texte théorique sur leur vision de l’antifasciste, en revenant sur les thèmes de “la liberté d’expression”, “La violence et l’usage de la force”, “La nécessité de lutter contre l’extrême-droite ici et maintenant”, “L’idéologie, les alliances et le front antifasciste”, “Le rapport entre les collectifs antifascistes et les « masses » : inspirer la spontanéité”, “Le féminisme et les luttes connexes”.

Nous reprenos ici quels ques extraits de l’article relayé par la Horde et originalement paru sur le site du Réseau Angevin Antifasciste

Ce texte ne s’adresse pas aux personnes dont le scepticisme les fait d’ores et déjà nous classer dans la catégorie des personnes infréquentables. En revanche, celleux de bonne foi qui désirent mieux comprendre notre vision de l’antifascisme trouveront un intérêt dans les lignes qui vont suivre. Les six points ci-dessous nous paraissent importants pour éviter les préjugés, raccourcis ou rumeurs dont un collectif antifasciste comme le nôtre peut parfois faire les frais.

1) La liberté d’expression

S’il n’est pas essentiel (et de toute manière vain) de convaincre le plus grand nombre que nous défendons une certaine liberté d’expression, il est important de dire quelques mots sur cette notion galvaudée. Arriver à penser un court instant que les fascistes seraient fondamentalement pour la liberté d’expression et que les antifascistes qui souhaiteraient les empêcher de s’exprimer seraient contre révèle une grande naïveté. En effet, le projet de société de l’extrême-droite porte en lui-même des propositions liberticides. Et au sein de celui-ci, la place pour la contestation, ou le débat d’idées, n’est sûrement pas plus grande que dans une autre tendance politique. On pourrait alors penser que le problème c’est qu’à force de les ostraciser, on leur offre la possibilité de se victimiser. C’est, de nouveau, une erreur. Les fascistes ne se victimisent pas parce qu’on ne les laisse pas assez parler. Illes se victimisent parce que c’est la stratégie qu’illes ont choisi pour susciter de l’empathie auprès des gens qui n’étaient pas directement convaincus du bienfait de leurs propositions. Ainsi, les laisser s’exprimer c’est leur laisser des espaces de paroles où illes pourront davantage se victimiser, convaincre un plus grand nombre de personnes et ainsi de suite.

Le discours des fascistes ne doit pas être compris comme autre chose qu’un venin qui se diffuse, petit à petit, dans le corps social. A chaque fois qu’un.e d’entre elleux écrit sur un réseau social un quelconque commentaire négatif sur les syndicats, les immigré.e.s ou les féministes, ille participe à polluer l’air du temps. En fin de compte, au bout d’un certain temps, cet air est tellement pollué qu’il finit par influencer plus ou moins les discours de tout à chacun.e.

Dans ce contexte, gêner, voire empêcher la tenue, par exemple, d’une conférence d’extrême-droite est un acte qui relève davantage de la salubrité publique que de l’instauration d’une prétendue dictature de la pensée unique. Car au final, que ce soit pour remettre en cause l’existence des chambres à gaz ou disserter sur la démographie en France, on ne peut malheureusement que constater avec tristesse de l’usage que les fascistes font de leur liberté d’expression.

Il restera cependant toujours quelques acharné.e.s qui, avec une certaine forme de fascination pour leurs adversaires, se battront pour que l’extrême-droite puisse conserver une parole publique. Nous en avons eu récemment un exemple flagrant au niveau local : une militante d’un parti de gauche a annoncé avec fracas sur les réseaux sociaux qu’elle quittait le mouvement pour pouvoir continuer à fréquenter des nationalistes, à la fois dans sa vie personnelle mais également en tant que militante, par goût du débat. Il est inutile de tenter de convaincre ce genre de personnes qui, sous couvert d’ouverture d’esprit, peuvent faire preuve d’une mauvaise foi parfois abyssale. Mais il convient également de dénoncer les discours confusionnistes dont le principal danger est de gêner la compréhension du rôle de l’extrême-droite.

2) La violence et l’usage de la force

S’il est aujourd’hui aussi banal de dire que « les antifas se comportent exactement comme les gens qu’ils combattent » que de dire « qu’il pleut toujours en Bretagne », ce n’est pas pour autant qu’il ne faut pas essayer de déconstruire ce type de lieux communs.

En s’inscrivant dans une lutte telle que l’antifascisme, on accepte de facto de rentrer dans un rapport de force. Celui-ci peut nécessiter le recours à une grande variété de techniques dont certaines peuvent être qualifiées de violentes dans le sens commun du terme. Nous ne devons pas d’emblée avoir peur de ces méthodes dans le sens où elles font partie du passé de cette lutte et probablement aussi de son futur proche. Pour autant, nous essayons de ne pas entretenir un fétichisme vis-à-vis de ces techniques. Et c’est précisément sur ce point que notre approche de la violence est radicalement différente de celles des fascistes. Pour ces derniers (en tout cas une partie), la violence est positive en soi et peut même devenir un but recherché. Elle est souvent perçue comme libératrice et cathartique. Les fascistes ne l’utilisent pas uniquement par rapport à autrui mais aussi pour eux-mêmes. Dans ce double mouvement, illes espèrent nuire à leurs adversaires tout en essayant de se transformer elleux-mêmes. De la violence des SS jusqu’à leur intérêt pour certaines formes de hooliganisme, on voit bien que leur rapport à la violence est lié à la domination et s’inscrit dans une tradition philosophique opposée à la nôtre. En ce qui nous concerne, la violence est surtout un outil dont l’efficacité sera jaugée en fonction des situations. Si pour empêcher la conférence d’un.e raciste notoire, il est possible d’organiser un sit-in de 10000 personnes et que la police n’a pas les moyens de déplacer cette foule, alors il faudra choisir cette technique. Si, en revanche, on ne peut compter que sur 100 camarades, alors il faudra peut-être opter pour des techniques nécessitant le recours à la force si l’on souhaite arriver au même résultat.

Enfin, il va de soi que l’antifascisme implique de se mettre dans des situations où l’on s’expose individuellement et collectivement à la violence de l’extrême-droite. Mieux vaut s’y préparer et partir du principe que celle-ci peut toucher n’importe lequel ou laquelle d’entre nous, militant.e antifasciste ou non d’ailleurs. Dans ce cas de figure, il n’existe pas de règles à suivre et chaque groupe envisagera la ou les techniques qu’il souhaite adopter en fonction des situations. Le fait que certaines d’entre elles impliquent une forme de violence ne doit pas être un problème en soi car le plus grand nombre peut comprendre leur légitimité dans des contextes d’auto-défense.

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