« Je sors » : une analyse critique de la révolte de 2020 contre la dictature au Bélarus

En 2020, le Bélarus fut le théâtre d’une révolte sans précédent contre la dictature au pouvoir. Cet article est un témoignage et une analyse de la part des anarchistes Bélarusses : les succès du mouvement, son échec final, la répression massive, etc.

Avant-propos pour la traduction française

En août 2021, le site Pramen.io organisait une vidéoconférence faisant le point sur la révolte bélarus de 2020, et sur la répression passée et actuelle. Même si cette conférence reprenait principalement des éléments présentés dans le texte que vous allez lire, en voilà un rapide résumé, complété par différents éléments glanés ici et là, entre autres au cours des deux tournées d’info de l’Anarchist Black Cross (ABC) Belarus qui passèrent en Europe occidentale en 2011 et 2014.

Le mouvement anarchiste bélarusse, tel qu’il existe actuellement, apparut dans les années 2000. Vers 2010, les forces répressives de l’État bélarusse commencèrent à prêter une grande attention au mouvement qui émergeait. La police fut formée à « connaître » les anarchistes, qui font depuis face à une répression constante.

Le mouvement anarchiste n’eut pas d’autre choix que d’adopter un fonctionnement quasi-clandestin. La surveillance constante de la police politique rendait l’organisation de la moindre réunion très compliquée. Toute action publique pouvait entraîner des arrestations et des peines de prison. En réponse, les anarchistes bélarusses surent créer des structures de solidarité solides, telles que l’ABC Belarus.

La révolte qui explosa le 9 août 2020 en Bélarus prit place dans un contexte particulier. Au printemps 2020, l’épidémie de COVID-19 et surtout sa gestion calamiteuse par le régime dictatorial avaient poussé la population à s’organiser par elle-même au quotidien. Les manquements à ce niveau de la part du régime firent également monter la colère contre Loukashenko, dictateur depuis 1994. Dès le mois de mai, ça chauffait dans le pays.

Pour autant, ce dernier n’annula pas la campagne électorale, et tenta une approche plus « douce » que lors des élections précédentes : les opposants purent faire campagne publiquement, certains eurent même droit à quelques minutes de passage à la télévision. Mais la popularité grandissante de certain-es opposant-es comme Sergueï Tikhanovsky et Viktor Babariko, encouragea Loukashenko à revenir aux « vieilles » méthodes, et à mettre en prison la majorité des candidat-es.

Le 9 août, soir de l’élection, Loukashenko fut annoncé gagnant avec 80 % des voix. La révolte explosa, non seulement dans les rues de Minsk, la capitale, mais partout dans le pays, ce à quoi ne s’attendait pas le régime.

Au matin du 12 août, le bilan répressif était de 6000 arrestations (chiffres officiels, la réalité est donc certainement plus importante), plus de 150 hospitalisations, et au moins cinq personnes tuées par la police.

Suite à ce déchaînement de violence répressive, une partie de l’opposition appela au calme. En face, le régime, sentant la situation lui échapper, relâcha la pression. Une désescalade eut donc lieu « des deux côtés de la barricade ». Côté contestataires, il y eut une chasse aux « provocateurs » appelant à des actions radicales, et le début d’un cycle de manifestations pacifiques. Ces manifestations furent tellement massives, rassemblant de 10 à 20 % de la population du pays, qu’une partie de l’opposition, principalement la frange libérale, tint pour acquise la chute du régime.

En majorité, les anarchistes ne crurent pas que Loukashenko partirait de lui-même, mais leur analyse, qui fut la bonne au final, ne réussit pas à influer sur le cours de la contestation.

De son côté, l’État mit en place une stratégie répressive très efficace, et reprit le contrôle des campagnes et des petites villes, endroits où le mouvement était peu médiatisé. Au moment où il ré-abattit ses forces sur la capitale, le mouvement se rendit compte de l’impasse pacifiste, mais il était trop tard pour regagner l’ampleur des premiers jours de révolte. Le mouvement s’éteignit peu à peu, sous les coups d’une répression méthodique.

Au sein du mouvement d’août 2020, parmi celles et ceux qui favorisaient l’action directe et frontale contre le régime, les anarchistes furent un modèle, parfois un peu trop idéalisé selon l’intervenant de la conférence. Organisé-es en petits groupes affinitaires, ils et elles étaient préparé-es à l’action, contrairement à la plupart des autres composantes du mouvement.

Les anarchistes ont participé à ce mouvement en ayant conscience que les revendications anarchistes étaient extrêmement minoritaires en son sein. Pour autant, leurs idées ont réussi à infuser au fil du mouvement, notamment leur opposition au centralisme étatique.

A l’heure actuelle, seize anarchistes et huit antifascistes sont emprisonnés au Bélarus. Quatre sont détenus sous régime antiterroriste et font face à des peines très longues. Il s’agit des quatre partisans ayant pris les armes et passés à la clandestinité avant leur arrestation (lire plus loin dans la brochure). Huit sont accusés de « participation à une organisation criminelle internationale », une qualification créée par le régime Bélarus, qui lui permet d’utiliser à charge les actions militantes passées de ces personnes et leurs liens avec des mouvements révolutionnaires étrangers.

Pour soutenir le mouvement anarchiste bélarusse, il est important de continuer à diffuser les informations à notre disposition et d’organiser des actions de solidarité. Par exemple, fin août 2021 fut lancé un appel à une semaine de solidarité avec la révolte bélarusse. Il est également possible d’envoyer de l’argent, par exemple à l’ABC Belarus ou au groupe Pramen. Et enfin, soyons solidaires en nous révoltant contre nos propres conditions de vie, partout où nous nous trouvons.

L’article qui suit est traduit de la version anglaise, lui-même traduit de la version originale en russe. Nous espérons que ces traductions successives ne divergent pas du sens original.

La suite à lire ici :
https://lenumerozero.mediaslibres.org/Je-sors-une-analyse-critique-de-la-revolte-de-2020-contre-la-dictature-au-5444

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