Retour sur le débat au Barricade autour de la question kurde

Résumé et analyse de la question kurde retracé par des activistes du PKK (parti des travailleurs kurdes) au barricade le samedi 31 octobre.

J’étais présent ce jour à l’intervention de sympathisants et militants du PKK au barricade, date importante puisque le lendemain se tenait en Turquie des élections législatives qui a vu la victoire du parti réactionnaire d’Erdogan et le faible score du HDP, parti pro-kurde, proche de la fraction armée du PKK qui lutte en ce moment même dans différentes partie du monde arabe et notamment en Turquie et en Iran. Cette organisation d’origine marxiste-léniniste a opéré un changement idéologique depuis la fin des années 90 sous la houlette de son chef de file, Abdullah Ocalan. A cet heure, il est grandement influencé par l’idée du confédéralisme démocratique se rapprochant dans le phraser occidentale du fédéralisme ou municipalisme libertaire, promouvant des idées autogestionnaires. Ce revirement, expliqué par deux camarades dans la salle et (faiblement) par les intervenants, semble décisif car il rompt avec la centralisation étatique prônée par les courants léniniste et maoïste même si certains militants du PKK sont encore aujourd’hui accaparés par une vision centralisatrice de la révolution. Pourtant, et c’est à signaler, les intervenants ont très peu insisté sur cet aspect, chose assez étrange vu le contexte, comme s’ils voulaient modérer leur discours. Compréhensible du moins, car l’intérêt principal du PKK est de se trouver des alliés puissants en occident pour peser politiquement sur la Turquie en un niveau géopolitique comme le montre les rapprochements entre le hdp et syryza par exemple.

Affiche appelant au débat - 429.7 ko
Affiche appelant au débat

L’intérêt du PKK s’explique par le rejet du nationalisme arabe, gangrène de tous les mouvements révolutionnaire arabes depuis les années 60 (il se constitue en force panarabique), d’une part, comme je viens de l’expliquer par leur intérêt de construire des structures politiques autogestionnaires et, d’autre part, à cause de l’éclatement territorial des kurdes disséminé dans plusieurs pays, ce qui empêche la question nationaliste voir étatique de se poser. Après avoir insister sur le fonctionnement des municipalités ou autres territoires tenus par le PKK, des militants de la "gauche révolutionnaire syrienne" arrive. Je serai d’ailleurs heureux de les rencontrer pour savoir qui ils sont et quelle est cette organisation de gauche luttant en Syrie ou plutôt qui se reconstitue en europe par des exilés. Ils reprochent au PKK de ne pas avoir officiellement condamné le régime de Bachar : à y repenser, ces propos semble assez hypocrite pour deux raisons. Tout d’abord, l’opposition syrienne refuse en cas de victoire de la compréhension et l’éducation à la langue kurde à l’école ou en tout cas, ne se pose pas la question de la culture kurde en Syrie. Deuxièmement, les kurdes, avec leur faible moyen et leur nombreux ennemis sur le terrain de la guerre n’ont pas intérêt stratégiquement d’ouvrir un énième front en Syrie alors qu’ils s’affrontent déjà avec les autorités en Turquie et en Iran et avec Daesh à Kobané : ces militants devraient relire Clausewitz [1].

Bref, pour comprendre l’attitude du PKK, il est nécessaire d’éviter l’ethnocentrisme et de plaquer des idées politiques occidentales sur un terrain autre, à des milliers de kilomètres d’ici, au surplus en guerre totale contre différents ennemis soutenus par les grandes puissances géopoliques et économiques de la planète tout en leur demandant une plus grande transparence dans l’usage des concepts propres aux idées politiques (enfin compréhensible pour les anarchistes dogmatiques). Mais, dans une France totalement pacifié, aseptisé, dominée par la marchandise et par l’autoritarisme du spectaculaire démocratique, la dénomination"terroriste", comme forme de gouvernement, écrase toute forme de lutte radicale. Le PKK nous montre une fois de plus qu’un vaincu historique est un terroriste en puissance.

P.-S.

D’autres contributions sont bien entendus souhaitables : je n’ai fait confiance qu’en ma mémoire, faible sous l’effet de quelques potions agréables. A développer et à approfondir.

Notes

[1Général Prussien du XIX siècle et théoricien de la guerre auteur de nombreux ouvrages militaires, stratégiques et historiques dont le plus important est De la guerre, considéré comme l’auteur de référence sur ces questions.

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