Dimanche 10 mars, 13H45, je me dirige vers l’arrêt du tram 3 de la gare afin d’aller dire bonjour à un ami à Figuerolles. Je savais qu’une manifestation de kurdes allait avoir lieu mais je préférais faire faux bond pour boire quelques bières à Figuerolles.

Cependant, voyant que les tram 1 et 2 sont bloqués, je me dirige par curiosité vers la place de la Comédie. J’aperçois une petite centaine de manifestants kurdes venus de plusieurs villes du sud pour protester contre une manifestation pro-Erdogan. Les flics sont positionnés devant l’opéra avec quelques cars de crs, voitures de flics et bacqueux. Tout à coup, charge des manifestants kurdes contre les flics qui voulaient clairement les empêcher de se rassembler, des chaises volent sur les condés qui répliquent par des gaz lacrymogènes pour dissoudre le rassemblement. Manque de pot, c’est raté, les kurdes arborant des drapeaux d’Ocalan, PKK et HDP sont décidés à rester sur place et à empêcher les manifestants nationalistes truques d’approcher la place. D’après les infos glanées sur place, ces derniers sont positionnés derrière l’opéra.

Fin du premier round :

les flics positionnés à l’opéra dégagent leurs camions pour se retrouver côté office de tourisme, mais plus près de la place Comédie, proche des cafés, tandis que les kurdes et les très faibles gauchistes leur font face. Puis, tandis que les kurdes refluent de l’opéra vers la comédie, des kurdes se précipitent sur des personnes surement turques à coup de batons pour leur casser la gueule, intervention des CRS à coup de grenades de désencerclement. C’est là, je pense, que les flics ont du arrêter les trois militants du PKK.

Vers 14h30-15H, j’aperçois la manifestation nationaliste turque avec slogans et pancartes nauséabondes et idiotes (PKK= DAESH=terroriste), environ 400-600 personnes déboulant du Corum avec un énorme service d’ordre faisant face à la contre manif, et au milieu, les poulets commençant à parlementer avec les turques. Face à face très tendu, les flics commencent à envoyer des rafales de grenades de désencerclement des deux côtés, mais énormément plus côté kurde, et avec beaucoup plus de poids : normal on est beaucoup moins nombreux et le pkk est considéré comme un groupe terroriste par l’Etat français.

Vers 16H-16H30, les flics commencent à débouler côté opéra tout en restant au milieu de la comédie entre les 2 ennemis. Charge des flics assez tranquille qui encerclent la contre manif kurde dont les personnes ne souhaitent visiblement plus se confronter avec la police, et sont pris en étau devant le Quick par les CRS qui les entourent tandis que le reste non pris, reste en solidarité. Cela permet aux nationalistes turques de continuer leur manif en passant par les rails du tram encadrés par leur service d’ordre et les CRS. Les deux camps s’invectivent à coup de slogans, point.

A 17h45, je pars de la comédie avec toujours les contres manifestants kurdes bloqués et entourés par les CRS au niveau du Quick. Les flics attendent que la manif turque se terminent pour libérer la place.

révolutionnaires kurdes enceclés devant la rue de la Loge

Vers 19h, les Kurdes encerclés alors par un cordon de CRS et bacqueux depuis près de trois heures, peuvent de nouveau circuler, et se dirigent, toujours sous une large escorte policière, vers le commissariat pour soutenir les personnes arrêtées. J’apprends ici l’arrestation de trois militants kurdes sans pour autant savoir s’ils se sont faits arrêter durant la charge des flics ou après.

Errant en enfant perdu dans ce monde de la désolation et du spectacle, accouru par hasard à cette manif, je dois dire que mon sentiment pour le PKK est mitigé. Je ne parle même pas des manifestants nationalistes turques, qui sont clairement des ennemis. Effectivement, le PKK lutte contre DAECH sur le terrain de la guerre, est une organisation de lutte armée en évolution d’un contenu maoiste ou marxiste léniniste détestable à une sorte de municipalisme libertaire dont je n’entrevois pas trop le contenu et les possibilités. Je me sens assez proche d’eux, notamment sur le terme de la lutte armée, sur la possibilité peut-être d’en finir avec le nationalisme arabe, mais je m’en méfie aussi par leur côté très militant, hiérarchisé et sans vie, peut-être est-ce parce que je considère tous les textes militants sur ce thème faits par des personnes qui ne sont jamais allées sur le terrain, nuls et sans intérêt ? Par contre, au niveau de l’organisation sur le terrain (pas en terme léniniste ou trotskyste), sur l’affrontement, c’était assez efficace et très puissant. Venus à une petite centaine, ils ont réussi à prendre de force la place de la Comédie et la tenir durant plus de trois heures sans aucun scrupule et à visage découvert comme s’ils n’avaient rien à craindre des arrestations, tout en étant décontractés durant le face à face avec la police, installés sur les quelques chaises des cafés encore en leur possession à ce moment là.

Un enfant perdu

nationalistes turques